Parle moi
Parle moi s’il te plaît
Parle moi s’il te plaît je t’en prie parle moi
Parce que je ne vois plus tes yeux
Tes yeux qui sont mon nord
Tes yeux qui font ma mort
Quand je m’éloigne d’eux
Parle moi
Car ta voix m’est si douce
Quand au secret des draps
Ton souffle fait danser
Les quelques plumes d’oie
Sorties de l’oreiller
Si ton silence est d’or
il est aussi blasphème
car le ciel et ma joie
se couvrent quand tu dors
Ton mutisme déclenche
une avalanche en moi
Mortelle, lente et blanche
Comme un manteau de froid.
Et les chiens de faïence
toujours ils se regardent et jamais ils n’aboient
Et qui sait ce qu’ils voient ?
Et qui sait ce qu’ils gardent ?
Oui, les chiens de faïence sont des chiens de garde
Car ils ne parlent pas
Parle moi
Regarde moi, j’approche et je te tends ma main
Mords-la je t’en supplie, fais quelque chose, tiens :
mords ma main jusqu’au sang
je veux sentir ta rage affluer dans mes veines
entendre entre mes côtes en résonner l’écho
dévorer ton visage, aspirer ton haleine
Je veux sentir tes ongles laminer mon dos
Je veux sentir mon corps éprouvé par tes crocs
Arraché, déchiré et traîné dans la glaise
Je veux que tu m’assènes le poids de tes maux
Et que plus jamais ; oh ! Jamais tu ne les taises.
Alors parle moi
Parle moi si tu veux, je ne peux te forcer
Et si je le pouvais, je ne le ferais pas
Prends le temps du silence
Le silence est ton droit
Le silence est ton garde
Et les chiens de faïence jamais ils n’aboient
Toujours ils se regardent.